Accaparement des terres : demain, à qui appartiendra la planète. Basta !
: Quelle est l’ampleur du phénomène d’accaparement des terres dans le monde ? Michel Merlet [1] : La Banque mondiale fait état de 56,6 millions d’hectares concernés en 2011 (presque la superficie de la France, ndlr), sur la base de données très partielles. L’observatoire Land Matrix [2], qui répertoriait 80 millions d’hectares en 2012, n’annonce plus aujourd’hui que 35,8 millions. Ces chiffres ne prennent pas en compte tous les phénomènes. Ainsi, les terres contrôlées par l’entreprise italienne Benetton en Argentine, acquises dans les années 1990, ne sont pas comptabilisées par la Land Matrix, car celle-ci ne s’intéresse qu’aux dix dernières années. Mathieu Perdriault [3] : L’ampleur exacte de ces phénomènes est sans doute impossible à établir. M. Le terme « accaparement » est contesté par les entreprises concernées… M. Les entreprises, elles, parlent « d’investissements »... M. M. M. M. D’où vient cette notion de droit de propriété absolu ? M. M. M.
Industrie chimique, sociétés de biotechnologies et géants du trading contrôlent la chaîne alimentaire mondiale. Certes, vous êtes libres d’acheter le produit que vous souhaitez, généralement dans un supermarché.
Mais savez-vous vraiment qui élabore vos menus ? Que le poulet en train de rôtir a toutes les chances d’avoir été conçu par le groupe franco-néerlandais Hendrix Genetics ou la firme allemande EW Gruppe ? Que le pain qui servira à accompagner le fromage a été pétri avec de la farine appartenant très probablement à l’une des dix firmes qui contrôlent le marché des céréales ?
Et que le blé a été négocié par le groupe français Louis Dreyfus ou l’états-unien Cargill ? Commençons par les semences, source de toute agriculture, qu’elle soit destinée à l’alimentation humaine ou animale. 75 % du marché mondial de semences est contrôlé par seulement… dix multinationales ! La moitié des terres en Europe est contrôlée par 3% de gros propriétaires. Les phénomènes de concentration et d’accaparement des terres ne concernent pas que l’Afrique ou l’Asie.
Les gros propriétaires terriens sont aussi très actifs au sein de l’Union européenne. C’est ce que montre une infographie publiée le 14 avril par l’organisation Transnational Institute basée à Amsterdam. Les données sont effarantes : 3 % des plus grandes exploitations agricoles contrôlent 50 % des terres dans l’Union européenne ! A l’instar de ce qui se joue en France (voir notre enquête), ces exploitations s’agrandissent au détriment des petites fermes. Entre 2003 et 2010, le nombre de fermes inférieures à 10 hectares (ha) a par exemple diminué d’un quart.
« La Guerre des Graines » : enquête sur une bataille souterraine et silencieuse. En 100 ans, sous les effets de l’industrialisation de l’agriculture, les trois-quarts de la biodiversité cultivée ont disparu.
Alors que se renforce la main-mise sur les semences par une poignée de multinationales, un vaste arsenal réglementaire limite le droit des paysans à échanger et reproduire les semences. Le documentaire « La Guerre des Graines », qui sera diffusé le 27 mai sur France 5, décrypte les batailles autour de la privatisation du vivant, avec l’appui de témoignages de paysans, d’élus, de militants, d’experts et d’industriels. Un film percutant et engagé, vivement recommandé par la rédaction de Basta !. « L’histoire que nous allons vous raconter est celle d’une guerre inconnue mais qui nous menace tous, la guerre des graines. » C’est par ces mots saisissants que débute le nouveau film de Stenka Quillet et Clément Montfort, produit par John Paul Lepers, qui sera diffusé sur France 5 le 27 mai prochain. Refuser l’esclavage semencier A découvrir, le dossier de Basta ! Dossier: Main basse sur les semences. Semences : contre une liberté totale de leur commercialisation.
10 000 ans que les paysans sèment, récoltent puis resèment une partie de leur récolte. 100 ans à peine que pour la majorité des paysans « occidentaux », cette pratique est remise en cause par des barrières techniques et juridiques qui visent toutes à les forcer à racheter chaque année des semences industrielles.
Que s’est-il passé ? Est-ce dangereux pour l’avenir des paysans et de l’alimentation ? Y a-t-il des solutions ? Au cours du XX° siècle, et surtout après-guerre, des entreprises se sont spécialisées dans la production et reproduction de semences (en France : Clause, Vilmorin...), laissant aux paysans le soin de produire... sans reproduire. Cette dichotomie s’est accentuée plus ou moins vite selon les espèces (la technique hybride pour le maïs, par exemple, réservant assez vite la production de semences aux mains des seuls semenciers), et elle est aujourd’hui généralisée [1].
Les semenciers privatisent la semence... pour notre bien Des points de vue radicalement opposés. Les nutritionnistes complices de l’agro-industrie. [D0C] : We feed the world : Le marché de la faim (vostfr)