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Leçons écologiques

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Ce que la pandémie nous apprend de notre place dans la nature, de notre rapport aux autres vivants et de la responsabilité humaine dans cette crise.

Edouard Bard : « La pandémie de Covid-19 préfigure en accéléré la propagation du réchauffement climatique » Tribune.

Edouard Bard : « La pandémie de Covid-19 préfigure en accéléré la propagation du réchauffement climatique »

La pandémie de Covid-19 n’est sans doute pas d’origine climatique, même si nous n’avons pas encore de certitude sur les éventuels changements environnementaux qui auraient pu rapprocher les populations des animaux hôtes (chauve-souris et pangolin) de l’homme. Néanmoins, l’épidémie en cours donne à réfléchir aux climatologues, car elle préfigure en accéléré la propagation du réchauffement mondial prévu pour les prochaines décennies.

La crise provoquée par le coronavirus constitue en quelque sorte une répétition générale, un crash test, pour les sociétés humaines. Bien évidemment, la vague climatique s’inscrit dans une durée plus longue que celle du Covid-19, mais on constate les mêmes réactions individuelles et collectives face au risque et à l’adversité, avec des réflexes d’incrédulité, de sidération ou de panique. Au-delà de ces caricatures, les crises épidémiques et climatiques montrent des similitudes bien réelles et malheureuses pour les populations humaines. Frédéric Keck : “Nous n’avons pas l’imaginaire pour comprendre ce qui nous arrive”

Un coronavirus transmis d’une chauve-souris à un pangolin sur un marché de Wuhan, puis aux humains du monde entier : qu’est-ce que cela signifie selon vous ?

Frédéric Keck : “Nous n’avons pas l’imaginaire pour comprendre ce qui nous arrive”

Frédéric Keck : Nous sommes en train de changer de monde, et l’Europe saisie par le Covid-19 vient de s’en apercevoir. La Chine, et les pays qui sont ce que j’appelle « les sentinelles des pandémies » (Taïwan, Singapour…), l’ont compris depuis longtemps. Après l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère [Sras] – déjà un coronavirus – en 2003, les investissements ont été massifs dans la recherche virologique, les techniques de repérage, de dépistage et de surveillance des populations pour se préparer à un épisode de ce type.

Les chercheurs chinois s’attendaient à un virus de chauve-souris qui cause une maladie respiratoire pandémique. “La Chine entend s’imposer comme le leader en matière de gestion des catastrophes sanitaires” Frédéric Keck Quelle est cette différence d’imaginaire qui empêche l’Europe de comprendre ? Frédéric Keck. Des chauve-souris et des hommes : politiques épidémiques et coronavirus. Les mesures de quarantaine, de confinement, et de surveillance arrivent toujours trop tard.

Des chauve-souris et des hommes : politiques épidémiques et coronavirus

Elles ne font qu’amoindrir des effets déjà actifs et envahissants, mais n’agissent en rien sur les causes du problème. Le Covid-19 est, rappelons-le, une zoonose : une maladie qui s’est transmise des animaux aux humains. C’est précisément dans nos rapports aux animaux qu’il faut chercher la raison de nombreuses crises sanitaires récentes : ESB, SRAS, grippes « aviaire » et « porcine ».

Nous avons donc interrogé Frédéric Keck, un anthropologue qui travaille sur les normes de « biosécurité » appliquées aux humains et aux animaux, et sur les formes de prévision qu’elles produisent à l’égard des catastrophes sanitaires et écologiques. Vous vous êtes illustré par vos recherches en anthropologie et en ethnologie sur les maladies zoonotiques (d’origine animale) et les pandémies.

La pandémie de coronavirus vous semble-t-elle différente par rapport aux autres pandémies que vous avez étudiées ? Pourquoi nos modes de vie sont à l’origine des pandémies. Coronavirus : la dégradation de la biodiversité en question. « Nous envahissons les forêts tropicales et autres paysages sauvages, qui abritent tant d’espèces animales et végétales – et au sein de ces créatures, tant de virus inconnus.

Coronavirus : la dégradation de la biodiversité en question

Nous coupons les arbres ; nous tuons les animaux ou les envoyons sur des marchés. Nous perturbons les écosystèmes et débarrassons les virus de leurs hôtes naturels. Lorsque cela se produit, ils ont besoin d’un nouvel hôte. Souvent, cet hôte, c’est nous. » C’est ainsi que l’écrivain américain David Quammen résume, dans une récente tribune au New York Times, pourquoi nous sommes en grande partie responsables de la pandémie de Covid-19. Huit ans plus tard, depuis sa maison du Montana, il observe cette crise avec frustration. « Lorsque je travaillais sur mon livre, les experts me prédisaient exactement ce qui est en train de se passer, raconte-t-il. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Coronavirus : « L’origine de l’épidémie de Covid-19 est liée aux bouleversements que nous imposons à la biodiversité » Comment les changements environnementaux font émerger de nouvelles maladies.

L’épidémie de coronavirus Covid-19 en cours, qui a débuté à Wuhan à la fin de l’année dernière, illustre bien la menace que représentent les maladies infectieuses émergentes, non seulement pour la santé humaine et animale, mais aussi pour la stabilité sociale, le commerce et l’économie mondiale.

Comment les changements environnementaux font émerger de nouvelles maladies

Or de nombreux indices portent à croire que la fréquence des émergences de nouveaux agents infectieux pourrait augmenter dans les décennies à venir, faisant craindre une crise épidémiologique mondiale imminente.