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Ecoutes du Monde : de l' «affaire d'Etat» à l' «intérêt national

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Liberté de la presse et mensonge d'Etat. Le 13 septembre 2010, Le Monde annonçait, ici même, son intention de porter plainte pour atteinte au secret des sources de ses journalistes. Le journal avait acquis la conviction que les services français de contre-espionnage avaient usé de moyens illicites pour éteindre l'incendie provoqué par nos révélations sur l'implication de l'ancien ministre du travail, Eric Woerth, dans l'affaire Bettencourt. A l'époque, la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) avait reconnu avoir surveillé, hors de tout cadre légal, les communications téléphoniques d'un des informateurs supposés du journal. Le contre-espionnage avait toutefois vigoureusement nié avoir fait de même pour notre enquêteur. Brice Hortefeux, alors ministre de l'intérieur, avait eu ce mot : "La DCRI, ce n'est pas la Stasi, son rôle n'est pas de tracasser les journalistes.

" Un an après, nous savons désormais qu'il s'agissait d'un mensonge. Deux conclusions s'imposent. Ecoutes de l'Elysée : du démenti à l'aveu. Espionnage du Monde: l'Etat va invoquer "l'intérêt national" La confirmation de "vérifications téléphoniques" à l'encontre de Gérard Davet, journaliste au Monde, va-t-elle déboucher sur une condamnation en justice? Cette perspective inquiète grandement l'exécutif, si bien qu'au sommet de l'Etat, on organise déjà sa défense.

Selon Le Monde, en cas d'auditions, les prévenus invoqueraient l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991. Celui-ci dispose que "les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de défense des intérêts nationaux, la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne ne sont pas soumis aux dispositions des titres 1 et 2 de la présente loi", qui exigent une autorisation écrite selon une procédure très contraignante. Le Monde précise toutefois que cet article "ne concerne en rien les facturations téléphoniques détaillées ("fadettes"). Le PS met la pression sur le gouvernement De son côté, l'opposition continue de mettre la pression sur le gouvernement. L'affaire Bettencourt entre dans la campagne 2012. (Dessin : Louison) Boule puante de la gauche ou manipulation du pouvoir ?

Chacun a sa lecture des derniers rebondissements de l’affaire Bettencourt. Le témoignage de la juge Prévost-Desprez dans Sarko m’a tuer (par Fabrice Lhomme et Gérard Davet du Monde) sur la remise d'argent liquide au futur chef de l'Etat puis son démenti par l'infirmière de Liliane Bettencourt paru dans Marianne ont agité le monde politique ces derniers temps. Et la Une du Monde daté du 2 septembre n'a fait que renforcer le doute sur les pressions politiques derrière l’affaire Bettencourt. Il s'agissait à l'époque de savoir qui informait les journaliste du Monde qui écrivait sur l'affaire Bettencourt, et notamment les politiques que finançait la milliardaire.

Mais peu importe les scandales, pour la droite, les accusations à l'encontre de Nicolas Sarkozy relèvent de la boule puante venant de la gauche. . « La politique de l'ordure » pour Juppé Du même auteur A gauche, on frappe aussi, mais dans le sens inverse. Espionnage du Monde : Guéant protège sa police. (Dessin : Louison) Il ne se passera (probablement) rien. La DCRI a bel et bien cherché à identifier les sources d’un journaliste du Monde sur l’affaire Bettencourt. Mais pour Claude Guéant, il n’y a « bien évidemment » pas matière à sanction. Bernard Squarcini, patron de la DCRI, et Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale, deux « grands serviteurs de l'Etat et de l'intérêt national » et tous deux proches de Nicolas Sarkozy, peuvent donc (pour l’instant) dormir tranquille.

Pourtant, comme l’a révélé le Monde, l’examen par la DCRI en juillet 2010 des factures téléphoniques détaillées de Gérard Davet, journaliste au Monde pourrait constituer une violation de la loi sur la protection des journalistes, circonstance aggravante, cet examen s’est fait en dehors de tout cadre légal, la DCRI n’ayant averti le parquet de Paris que début septembre 2010. Courroye déjà désavoué Du même auteur Le chef de l'Etat devrait pourtant mieux se pencher sur le dossier. Fusibles.