Neuf auteurs (et un éditeur) en quête de personnages. Sarraute et Duras devant la machine à café. Avignon, envoyée spéciale.
Dans Nouveau roman, dont la longueur varie selon les soirs, du genre work in progress (en ce moment, trois heures quarante-cinq), on croise Alain Robbe-Grillet en chef de troupe d’un mouvement littéraire né en 1953 et justement autoproclamé nouveau roman. Il a pour ambition de provoquer une rupture totale avec la littérature dite conventionnelle, brandissant avec effronterie des préceptes tels que : Abolition de l’intrigue classique ! Mort du héros de roman ! Festival Honoré en Avignon. C’est un véritable autodafé dans cette cour du lycée Saint-Joseph d’Avignon.
Aux cris de "Mort aux romans du XIXe siècle", Balzac, Zola, Flaubert sont précipités dans les flammes d’un brasero. Les barbares qui alimentent le bûcher sont pourtant des écrivains mais en rupture avec "l’ancienne littérature". Honoré bien cavalier - Christophe HONORE. Route 66, étape 5 - La Déception. "En fait, les créateurs de personnages, au sens traditionnel, ne réussissent plus à nous proposer que des fantoches auxquels eux-mêmes ont cessé de croire.
" C'est Alain Robbe-Grillet qui le dit, et c'est un parfait incipit de ce en quoi a échoué Christophe Honoré. Nouveau Roman rate l'hommage sans atteindre la proposition blasphématoire qui aurait pu s'imaginer. C'est dommage, car l'idée aurait pu être bonne. Avignon, on rit ! Avignon s'amuse beaucoup avec deux formidables spectacles : Le Maître et Marguerite et Nouveau Roman, l'un adaptation de l'oeuvre de Mikhaïl Boulgakov, l'autre inspiré par l'aventure du groupe littéraire le plus controversé du XXe siècle.
Les écrivains Sarraute, Butor, Duras, Simon, Mauriac, Pinget et Ollier sont mis en scène par Christophe Honoré, homme de cinéma et de théâtre. Et alors ? Avignon : le théâtre tous azimuts. On fête cette année en Avignon le centième anniversaire de la naissance de Jean Vilar. En grande pompe : copieuse exposition, publication d'inédits. Mais, si le créateur du festival revenait par miracle dans la cité des Papes, il serait fort surpris. Dans une ville médiévale où il avait instauré un festival longtemps méditatif - juste trois pièces jouées dans la nuit provençale -, il n'y a plus qu'empilage de spectacles, de récits, de concerts, de projections de débats, de colloques et de parades.
Chez les Papes, on ne sait plus à quel saint se vouer : 40 pièces dans la manifestation officielle, 1 200 dans le off qui court dans toutes les rues sinueuses et bien au-delà des remparts. Essayons d'y voir clair. La légende comique du Nouveau Roman. Christophe Honoré, le pourquoi du roman. Le spectacle de Christophe Honoré pourrait s’appeler «Boulevard du Nouveau Roman».
Les prophètes de chez Minuit, soudain virevoltants, battent le vaudeville et la chamade. Ils semblent réinventés tantôt par Demy, tantôt par Sagan, tantôt par Guitry, tantôt par un jeu télévisé. Ils dansent, chantent, s’engueulent, font rire, soupirer ou pouffer. Sur le grand plateau, autour d’un bureau de juge, ce sont bien leurs paroles qu’on entend, mais la musique a changé. Peau d’écrivain, peau d’âne, peau finalement à retirer : sous l’histoire d’une aventure allant de la publication de Molloy de Beckett à la mort de Jérôme Lindon, tout ou presque est dit ou montré, mais d’un battement de cil, de cœur, l’insouciance apparaît. - Remettre en jeu le Nouveau Roman / - Théâtre au Festival d'Avignon. Christophe Honoré fait entendre l’ambition et l’aventure des écrivains du Nouveau Roman à travers leur incarnation vivante sur la scène.
C’est la littérature même et le statut d’écrivain qui sont interrogés par cette œuvre. Il est aussi à l’affiche du Festival en tant qu’auteur avec deux pièces, mises en scène par Eric Vigner et Robert Cantarella. « Qu’est-ce que les écrivains attendent de la société et de leurs lecteurs ? » Pourquoi avez-vous voulu donner vie sur une scène de théâtre aux écrivains du Nouveau Roman ? McBurney, Honoré et Mitchell croisent les littératures au festival d'Avignon 2012. Philippe Couture / 17 juillet 2012 Depuis la querelle des Anciens et des Modernes qui a secoué le festival d'Avignon en 2005 autour de la programmation influencée par l'artiste associé Jan Fabre, opposant violemment le théâtre de texte au théâtre d'images, il est admis qu'Avignon est ce lieu du décloisonnement, où le théâtre n'est plus textocentriste et embrasse des formes imagées, performatives, dansées, et parfois même tout ça à la fois, ou bien encore d'autres formes inclassables.
Or, le texte, ou plus largement la question de la narration ou de la fiction, n'a jamais vraiment cessé de traverser les programmations. Festival d'Avignon/Bavards appliqués. Christophe Honoré nous l’avait confié, lors d’une rencontre avec le public à la Chartreuse de Villeneuve au printemps, il ne savait pas où il allait avec ce «Nouveau Roman».
Tout au plus savait-il avec qui il y allait : une belle troupe de dix comédiens jeunes ou moins jeunes supposés incarner cette « meute » d’écrivains ayant révolutionné la littérature made in France autour de Jerôme Lindon et des éditions de Minuit. Au sortir de la cour du Lycée Saint-Joseph, on est un peu forcé de l’admettre : ce qui s’annonçait comme une « forme théâtrale impure » censée explorer un courant artistique majeur avec audace et iconoclasme se révèle une étrange logorrhée, entre Wikipédia et le Masque & la Plume… Divertissement sans engagement Il est néanmoins difficile de ne pas être diverti par «Nouveau Roman».
La distribution est tout à fait irrésistible et, dès l’introduction en élégante nonchalance de Julien Honoré, on comprend que l’esprit de troupe fonctionne à plein. Avignon/ Christophe Honoré présente "Nouveau Roman", sa création pour le Festival 2012. Insaisissable.
Christophe Honoré est de ces artistes français qui se plaisent à brouiller les pistes quand il s’agit de leur parcours. Auteur, réalisateur de cinéma (huit long métrages dont "les Chansons d’Amour", son plus grand succès) et aujourd’hui metteur en scène de théâtre pour la deuxième fois après "Angelo, Tyran de Padoue" au festival en 2009. En décidant de raconter un groupe de créateurs ayant changé radicalement la face de leur art, on aurait pu penser, vu son pédigrée, qu’il mettrait en scène les Godard, Truffaut ou autre Rohmer, les pères de la Nouvelle Vague. Erreur: c’est à leur pendant littéraire qu’il a choisit de s’intéresser. Festival d'Avignon/Trois fois Christophe Honoré. Christophe Honoré Photo DL Il y a le cinéaste biberonné à la Nouvelle vague.
Le dramaturge inspiré des malaises adolescents. Le scénariste, le parolier et le romancier pour la jeunesse qui ne sont sans doute jamais bien loin. Christophe Honoré pourrait paraître comme l’archétype de l’artiste multiple qui refuse de choisir une étiquette et qui réussit partout. Protéiforme, comme le sera sa création « Nouveau Roman », qu’il décrivait lui-même au printemps comme une « forme théâtrale impure ».
Honoré l’auteur sera quant à lui joué deux fois : d’abord par les tout jeunes comédiens de l’Académie de Lorient sous la direction d’Eric Vigner dans « La Faculté », texte dans lequel une tragédie meurtrière vient bouleverser l’univers d’un groupe de lycéens. Les étudiants, bénédictins du "Nouveau roman" d'Honoré. Festival d'Avignon/C’est un beau (Nouveau) Roman. « Le problème de Duras c’est qu’elle pensait être le plus grand écrivain du monde. Ce qui était vrai. Mais nous l’étions tous ». Ainsi parlait Alain Robbe Grillet, l’un des chefs de file du Nouveau Roman, ce mouvement littéraire né en 1953 pour repousser les limites du roman traditionnel.
Et c’est ce qui pourrait caractériser l’esprit de son cercle d’auteurs, d’après Quentin Amalou et Baptiste Rol, deux des 12 étudiants qui ont nourri la création de Christophe Honoré au Festival d’Avignon. Un rôle de conseiller sociologique en binôme avec chaque comédien « On a fait des recherches anthropologiques sur les relations du groupe qui remettait en cause la narration dans l’écriture, comme la Nouvelle Vague et le “cinéma à papa” » explique Quentin.
Une énorme masse documentaire Les étudiants se livrent à une course “enquête” dans la bio des auteurs, suivant les demandes très différentes. . « On a apporté une énorme masse documentaire ! "Nouveau Roman" de Christophe Honoré, une aventure théâtrale d'une rare fraîcheur. « La marquise sortit à cinq heures. » Selon Paul Valéry, cette phrase discrédite définitivement le roman classique. Quand à l’aube des années 1950, Nathalie Sarraute déclare que « le roman ne croit plus à ses personnages, le lecteur non plus », elle confirme à son tour cette mort du roman balzacien que Valéry puis les surréalistes avaient affirmé haut et fort. Dans la mise en scène parfois inégale, mais pleine de charme et nourrie d’intuitions stimulantes que Christophe Honoré consacre au Nouveau Roman, Nathalie Sarraute a les traits de Ludivine Sagnier. Tout comme les autres acteurs – tous impeccables – de ce spectacle, elle n’incarne pas un personnage, mais existe par elle-même.
Le Nouveau Roman ce sont d’abord des personnalités irréductibles qui n’entendent pas se glisser dans un moule. Honoré montre bien la difficulté qu’éprouve Alain Robbe-Grillet, le plus emblématique sans doute de ces auteurs, à enrôler ses camarades sous une bannière commune. Christophe Honoré, Nouveau Roman, feuilleton. Il y a un demi-siècle, cet agglomérat qu’on appelle indûment Nouveau Roman a posé des questions que la plupart des lecteurs et écrivains ont préféré oublier. Peut-on continuer d’écrire aujourd’hui «comme Balzac» ? Ce qui compte dans un roman, est-ce le récit, les personnages, la petite morale à deux sous de l’histoire, ou bien, par-dessus tout, l’aventure de la conscience et de l’écriture elle-même ? C’est bien joli de raconter des histoires, mais il faudrait se demander ce qu’écrire veut dire.
Posées après la Seconde Guerre mondiale, pendant la guerre d’Algérie, ces questions étaient politiques. Dans sa première pièce de théâtre, l’écrivain et cinéaste Christophe Honoré les met en scène à travers des écrivains qui, d’une manière ou d’une autre, les ont affirmées. “Nouveau roman”, la saga longuette mais séduisante de Christophe Honoré - Arts et scènes.
Christophe Honoré, la nouvelle vie du "Nouveau Roman" LE MONDE | • Mis à jour le | Par Brigitte Salino (Avignon, envoyée spéciale) La photo est célèbre. Elle a été prise en 1959 devant l'immeuble des Editions de Minuit, rue Bernard-Palissy, à Paris.