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Eduquer au XXIe siècle. Entre 1900 et 2011, tout a changé pour les écoliers qui vivent à présent dans le virtuel et dans une société multiculturelle, analyse Michel Serres.

Eduquer au XXIe siècle

Il faut aider l'école à prendre la mesure de cette nouvelle ère. Le Monde.fr | • Mis à jour le | Par Michel Serres, de l'Académie française Avant d'enseigner quoi que ce soit à qui que ce soit, au moins faut-il le connaître. Qui se présente, aujourd'hui, à l'école, au collège, au lycée, à l'université ? Ce nouvel écolier, cette jeune étudiante n'a jamais vu veau, vache, cochon ni couvée. . - Il habite la ville. . - Son espérance de vie va vers quatre-vingts ans. . - Depuis soixante ans, intervalle unique dans notre histoire, il et elle n'ont jamais connu de guerre, ni bientôt leurs dirigeants ni leurs enseignants. . - Alors que leurs parents furent conçus à l'aveuglette, leur naissance est programmée. Bilan temporaire. L’école ne peut pas être un lieu de plaisir.

Apprendre pour un gosse, c’est pénible, c’est rébarbatif, en deux mots c’est chiant.

L’école ne peut pas être un lieu de plaisir

Pour un ou une adolescente, la contrainte est encore pire vu l’antagonisme entre l’acquisition du savoir et les plaisirs de cet âge. En dehors de quelques intravertis, timides et mal dans leur peau, aucun gamin n’aime l’étude. Et même pour ces cas, si apprendre peut être supportable, leur manque de sociabilité transforme l’école en calvaire. Certains y vont sans pleurer et sans rechigner, non par satisfaction de la connaissance et de l’apprentissage, mais uniquement à cause des copains.

Les méthodes dites ludiques, d’apprendre en s’amusant sans effort et sans punition, sont des escroqueries intellectuelles incapables de donner des résultats probants. Créativité dans l'éducation. On a bien du mal dans le système sclérosé qu’est le système éducatif, à revendiquer des espaces de liberté et de démocratie pour que s’expriment enfin la créativité ou les innovations souhaitées.

Créativité dans l'éducation

Dans les rencontres européennes, on prône Edgar Morin et ses savoirs essentiels pour demain mais sur le terrain, les enseignants ont bien du mal à maintenir quelques savoirs essentiels d’hier. Violences, manque de valeur et de respect de l’école sont là et les apprentissages on-line individualisés mais privatisés remplacent déjà pour beaucoup d’enfants, les apprentissages publics et collectifs. Dans le même temps on réforme les formations initiales des enseignants en les chargeant de cours théoriques universitaires peu concrets, à 20000 lieues des besoins du terrain, et on constate la fuite de ces jeunes enseignants qui une fois dans la vie professionnelle et en situation réelle, s’adaptent mal aux difficultés des classes.

Petite Poucette, la génération mutante. Michel Serres, diplômé de l’Ecole navale et de Normale Sup, a visité le monde avant de l’expliquer à des générations d’étudiants.

Petite Poucette, la génération mutante

Historien des sciences et agrégé de philosophie, ancien compagnon de Michel Foucault, avec qui il a créé le Centre universitaire expérimental de Vincennes en 1968, il a suivi René Girard aux Etats-Unis, où il enseigne toujours, à plus de 80 ans. Ce prof baroudeur, académicien pas tout à fait comme les autres, scrute les transformations du monde et des hommes de son œil bleu et bienveillant. Son sujet de prédilection : la jeune génération, qui grandit dans un monde bouleversé, en proie à des changements comparables à ceux de la fin de l’Antiquité. La planète change, ils changent aussi, ont tout à réinventer. «Soyons indulgents avec eux, ce sont des mutants», implore Michel Serres, par ailleurs sévère sur sa génération et la suivante, qui laisseront les sociétés occidentales en friche.

Vous annoncez qu’un «nouvel humain» est né. Pascale Nivelle. Qu'est-ce qu'un bon prof ? C’est au début du mois de juillet 2010, qu’une journaliste (du Pèlerin magazine) me contacte pour réaliser une interview.

Qu'est-ce qu'un bon prof ?

Sans jouer les blasés, c’est quelque chose d’assez fréquent et auquel je me plie bien volontiers bien que, à chaque fois, j’ai l’impression de ne pas avoir grand chose d’original à dire. Le sujet ? “Qu’est-ce qu’un bon prof ?”. Même si, comme tous les enseignants, j’ai été amené déjà à réfléchir à cette question (depuis 30 ans…) et que mes fonctions de formateur m’ont fait approfondir le sujet, cette question là n’est pas facile. Car, finalement, elle vous oblige à vous dévoiler et à parler beaucoup de soi et des raisons pour lesquelles on est devenu prof. J’essaierai donc d’abord de donner quelques idées qui me tiennent à cœur même si elles ne prétendent pas faire le tour de la question.

Etre cohérent Cela veut dire aussi qu’il ne faut pas annoncer et promettre des choses qu’on ne peut pas tenir. Etre bienveillant La bienveillance c’est aussi un devoir d’empathie.