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Méritocratie

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L’économie de la connaissance à l’épreuve du recrutement. Si l’« économie de la connaissance » fait aujourd’hui figure d’horizon probable et désirable, c’est parce qu’elle laisse entrevoir un monde intelligent, où des gens intelligents exerceront des métiers de plus en plus intelligents, mobilisant leur tête et leurs talents (en laissant, mais c’est sa face sombre moins souvent mise en avant, aux pays pauvres la sueur et l’exploitation de la force brute).

Il s’agit là d’un credo, porté notamment par l’OCDE, qui sous-tend en particulier les politiques de développement des scolarités longues, sachant que c’est le développement des scolarités longues qui est souvent mis en avant (ce qui est pour le moins circulaire) comme preuve tangible de la dite économie de la connaissance. Il est certes difficile de confronter ce credo à des données empiriques pertinentes. Sans entrer dans le détail de toutes ces analyses, la tonalité de leurs résultats apparaît assez consistante, même s’ils peuvent de prime abord paraître triviaux. Aller plus loin : Une histoire sans fin ? Huit ans après la sortie de son ouvrage 80% au bac et après [1], qui portait sur les modalités d’accession à l’université de ceux qu’il appelle « les enfants de la démocratisation » Stéphane Beaud – avec Bernard Convert – continue dans le dernier numéro des Actes de la Recherche en Sciences sociales d’explorer les pratiques des étudiants des milieux populaires dans l’enseignement supérieur massifié.

Le numéro, spécifiquement tourné vers les stratégies et les pratiques des élèves, permet ainsi le renouvellement empirique d’un objet d’études où l’apport bourdieusien demeure encore aujourd’hui central, bien que, comme le notent les auteurs, ses tenants et aboutissants ne soient pas toujours clairement compris par les pouvoirs publics. Dès lors, la grande force de ce numéro repose sur la prise en compte d’un grand nombre de filières du supérieur, à travers une approche globale de la condition étudiante qui inclut l’emploi et les sociabilités.

Des discours institutionnels en trompe l’œil. Le diplôme contre l’égalité. Ce texte répond à l’article de Philippe Coulangeon intitulé « Les sociétés malades de leur école ? » publié sur La Vie des idées le 8 mars 2011 au sujet du livre F. Dubet, M. Duru-Bellat et A. Vérétout, Les sociétés et leur école. Emprise du diplôme et cohésion sociale, Le Seuil. Il est toujours intéressant d’être confronté à des critiques précises. Les débats ne sont pas si présents dans notre pays et sur les questions dont nous traitons dans Les sociétés et leur école ils sont souvent monopolisés par les économistes, avec l’ombre portée de l’OCDE, quelle que soit l’apparente rigueur des analyses. Que peuvent dire les statistiques ? Dès qu’elle s’aventure dans le domaine des comparaisons internationales, la recherche rencontre des obstacles quasi rédhibitoires pour affirmer que tel phénomène serait la cause d’un autre.

Les faits sont-ils plus nets quand on s’intéresse à la croissance ? L’essentiel de notre argumentation n’est sans doute pas là. Philippe Coulangeon. Le Rêve américain et l’idéologie méritocratique. A l’heure où l’invocation du mérite constitue un thème fort – et l’un des plus consensuels – des politiques au pouvoir, le livre de deux sociologues américains, S. Mc Namee et R. Miller apparaît particulièrement intéressant. Il questionne en effet la croyance en la méritocratie consubstantielle au « rêve américain », puisque les Etats-Unis sont censés être le pays où toutes les opportunités sont ouvertes pour quiconque entreprend de mobiliser ses talents. Recensé : Stephan J. Dès lors que dans le même temps toutes les données statistiques font apparaître de fortes inégalités sociales selon des facteurs aussi éloignés du mérite que les origines familiales ou les relations personnelles, cette croyance apparaît bien pour ce qu’elle est : une idéologie qui « supporte » (au sens anglo-saxon) la société dans son mode actuel de fonctionnement.

Ce mérite est-il répandu au hasard, comme le voudrait l’obsédante courbe de Gauss mise en exergue par Herrnstein et Murray ? Le retour des classes sociales. Dans les derniers jours de juillet, le Congrès américain a voté en faveur d’une mesure qui n’avait pas été prise depuis bientôt dix ans : l’augmentation du salaire minimum. Depuis 1997, une période qui coïncide largement mais pas totalement avec la domination du Parti républicain sur tous les mandats du gouvernement américain [1], le salaire horaire minimum était en effet bloqué à 5,15 dollars. On peut s’interroger sur les raisons pour lesquelles cette question, si longtemps négligée, a subitement été promue au rang d’enjeu urgent par le parti de George W.

Bush. La réponse tient en partie à l’approche des élections parlementaires de novembre qui constituent sans doute le défi le plus sérieux que la majorité républicaine ait eu à affronter depuis des années : les Républicains sont impatients de pouvoir revendiquer quelques réalisations à mettre au crédit d’un Congrès dont beaucoup ont moqué l’inaction. La fin de l’exception américaine ? Qu’un spectre hante l’Amérique de George W. Quand les étudiants doutent du mérite. Recensé : Élise Tenret, Les étudiants et le mérite, à quoi bon être diplômé ? , Paris, La documentation française, 2011, 157 p., 18 €. Le mérite est une de ces notions à la fois vagues et consensuelles. Sans être toujours capables d’en donner une définition claire et définitive, ou, plutôt, en la reformulant perpétuellement au gré des humeurs et des occasions, les acteurs sociaux s’accordent généralement à lui trouver des vertus.

Comment en effet remettre en question cette idée de bon sens selon laquelle les efforts et les talents doivent être justement récompensés ? Force serait donc d’admettre l’existence d’une sorte d’adhésion enthousiaste des individus à ce principe de justice. C’est en tout cas le pari fait par une certaine tradition sociologique. C’est une attitude théorique résolument inverse qui est au fondement du travail d’Élise Tenret. Le succès du mérite Enfin, le mérite doit beaucoup de sa reconnaissance à son double caractère polysémique et abstrait.