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Qui étaient-ils ?

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EN IMAGES. Dix citations de Cabu, Charb, Wolinski et Tignous à ne pas oublier. En une fraction de secondes, la France a perdu cinq de ses plus grands dessinateurs de presse. Cabu, Charb, Wolinski, Honoré et Tignous font en effet partie des douze personnes assassinées, le 7 janvier 2015, lors de l'attaque terroriste perpétrée au siège du journal satirique Charlie Hebdo, à Paris. Leur crime : avoir défendu sans relâche, semaine après semaine, numéro après numéro, la liberté d'expression et la liberté de la presse. En relisant ou réécoutant quelques-unes de leurs interviews, franceinfo a sélectionné dix citations, signées Cabu, Charb, Wolinski et Tignous. Dix citations qui donnent à réfléchir sur la démocratie, la liberté, l'humour, le second degré et la caricature. Wolinski, amoureux de liberté et des petites pépées.

Il incarnait toutes les métamorphoses de l'esprit de mai 68. Georges Wolinski, 80 ans, a été assassiné ce mercredi aux côté de Charb, Cabu, Bernard Maris et d'autres membres de la rédaction de “Charlie Hebdo”. Gros cigare, œil brillant, sourire goguenard, Georges Wolinski était une figure du 9e Art et des soirées parisiennes. A 80 ans, ce pilier de Charlie Hebdo incarnait toutes les métamorphoses de l'esprit de mai 68.

Entré en 1961 à Hara Kiri, Wolinski fait ses classes auprès de François Cavana. A son contact, le gamin pétri d'érudition et un rien introverti qui admirait les caricatures d'Albert Dubout et les dessins satiriques d'Harvey Kurtzman (Mad), apprend à épurer son style à aller droit au but. A la fin des années soixante, son trait rond, ses personnages à gros nez et son humour aussi vachard que frontal, font mouche. Le « gauchiste libertaire » n'était pas d'ailleurs insensible aux jeux, poisons et délices du système, ni aux ors de la République. Charb, dessinateur mort debout. Le directeur de “Charlie Hebdo” est mort. Assassiné par ceux qu'il combattait à la tête de son journal. « A nous de repousser les limites ».

En 2011, dans le portrait qui lui était consacré, le dessinateur Charb, directeur de Charlie Hebdo, ne savait pas à quel point elles seraient repoussées, ces limites. Jusqu’à le tuer ce mercredi 7 janvier dans l'attentat commis contre son journal. Le dessinateur Charb, de son vrai nom Stéphane Charbonnier, avait 47 ans. En prenant la direction de Charlie Hebdo, en 2009, après le départ de Philippe Val, et trois ans après la polémique des caricatures de Mahomet il savait les risques qu'il prenait.

Menacé de mort à plusieurs reprises par des individus agissant « au nom de la défense de l’islam », il se retrouve sous protection policière permanente. « Je n’ai pas de gosses, pas de femme, pas de voiture, pas de crédit, déclarait-il au Monde en 2012. Cabu, le grand Duduche assassiné. Le dessinateur fait partie des victimes de l'attentat contre la rédaction de “Charlie Hebdo”. Il avait initié la relance de l'hebdomadaire en 1992. La légende le disait capable de crayonner sur un carnet, au fond de sa poche, sans même regarder. Son rêve de jeunesse, pourtant, était d’être batteur dans l’orchestre de Cab Calloway.

Jean Cabut, dit Cabu, était finalement devenu dessinateur. Né en 1938 à Châlons-sur-Marne, il œuvra d’abord dans le journal de son lycée, avant d’être publié par L’Union de Reims. Après des études à l’école Estienne, il effectue son service militaire en Algérie. « A l'époque, c'était pour moi le symbole de l'horreur, expliquait-il en 1996 à Libération. En 1958, au milieu de la guerre d'Algérie, je suis parti deuxième classe au 9e régiment des zouaves, dans le Constantinois. A son retour, ce grand timide, qui se disait « nul à l’oral », collabore à Hara-Kiri (1960-1983), Pilote (1962-1972), ou au Figaro (1966-1971). Honoré, l'homme modeste. Finesse du trait, justesse du ton… Honoré savait saisir l'absurde du monde dans ses vignettes. Il avait signé la carte de vœux de “Charlie Hebdo”, qui vient de faire le tour du monde.

Il avait préféré oublier son prénom : Philippe, né à Vichy en 1941, il ne trouvait pas la plaisanterie bien fine. Honoré était un homme discret qui n’aimait pas les artifices, ni dans la vie, ni dans ses dessins. C’est lui qui signait, quelques heures avant l’attentat de Charlie Hebdo, la carte de vœux du journal, définitivement symbolique, envoyée partout via Twitter. Il avait commencé sa carrière dans le quotidien Sud-Ouest. On le retrouvait ensuite dans Le Magazine littéraire, Libération, Le Monde et au mensuel Lire où il signait le fameux « Rébus d’Honoré ».

Il y condensait en strips de trois images le titre d’une œuvre littéraire, le nom d’un héros de roman. Dès 1992, il rejoignait la rédaction de Charlie Hebdo, leur fournissant des dessins d’actualité politique et économique. Tignous, un humaniste féroce. Tignous n'épargnait personne. Cet homme de convictions avait, comme ses confrères de “Charlie Hebdo”, l'humour pour seule arme. Tignous a été assassiné le 7 janvier 2015. « Jamais il n'aurait imaginé que la reine d'Angleterre se fendrait d'un communiqué de condoléances à l'égard de Charlie ».

Ça doit bien l'amuser là où il est… » Encore sous le choc de la disparition de Tignous, son neveu et ami, Serge Orru ne peut s'empêcher de pouffer. Bernard Verlhac, alias Tignous, n'était pas l'ami des princes et des puissants. Capitalistes véreux et bedonnants, artistes confits dans leur gloire, footballeurs décérébrés, « filles et fils de » bouffis d'arrogance, intégristes bêtes et puants, Nicolas Sarkozy : son trait n'épargnait personne. Si le grand brun de 57 ans avait l'air d'un nounours, la férocité et la pertinence de ses dessins étaient dignes des meilleurs Reiser, l'un de ses maîtres à dessiner. Bernard Maris, la disparition d’un économiste passionné. Celui qu’on surnommait “Oncle Bernard”, économiste anti-libéral, à la fois chroniqueur et actionnaire de “Charlie Hebdo”, a été tué dans l’attentat de ce mercredi 7 janvier. Déjà on se frottait les mains à l'idée de l'entendre, dans un débat, défendre son avis sur Soumission, le livre de Michel Houellebecq dont tout le monde parle depuis deux jours.

Dans la dernière livraison de Charlie Hebdo, ce mercredi, Bernard Maris, le tenait d'ailleurs pour un « pur chef d'œuvre ». Peut-être que le journaliste des Echos Dominique Seux, vendredi sur France Inter, à l'heure du traditionnel duel verbal entre les deux éditorialistes, aurait trouvé matière à le taquiner ; lui qui avait décelé dans la prose de l'écrivain désabusé, qu'il tenait pour l'un des plus grands du siècle, une critique visionnaire du monde libéral – au point de lui consacrer un ouvrage, Houellebecq économiste, paru l'an dernier. Hommage à la rédaction de Charlie Hebdo - L'hommage de L'Obs. Juste avant le départ de la grande marche républicaine en hommage aux victimes des attentats de cette semaine, le compte Twitter du Premier ministre Manuel Valls a égrainé un à un, dans l'ordre alphabétique, les noms 17 personnes tuées, à "Charlie Hebdo", à Montrouge et à la porte de Vincennes.

Nous ne les oublierons pas. A "Charlie Hebdo" Frédéric Boisseau Agent de maintenance de la société Sodexo, Frédéric Boisseau avait 42 ans. Ce père de deux enfants de 10 et 13 ans se trouvait dans le hall d'entrée du journal pour réaliser des travaux d'entretien de l'immeuble. Franck Brinsolaro Policier chargé de la protection de Charb, Franck Brinsolaro avait 49 ans. Jean Cabut, dit Cabu Dessinateur, Cabu, de son vrai nom Jean Cabut, avait 76 ans. Elsa Cayat Psychiatre et psychanalyste, Elsa Cayat avait 54 ans.

Stéphane Charbonnier, dit Charb Dessinateur, Charb, de son vrai nom Stéphane Charbonnier, avait 47 ans. Philippe Honoré, dit Honoré Bernard Maris Ahmed Merabet Mustapha Ourrad Michel Renaud. L'histoire de Charlie Hebdo en vidéos. Souriez vous êtes informés Cabu. Charlie Hebdo, une saga de l'impertinence pertinente. 1960, François Cavanna, fils d'immigrés italiens et ancien du STO crée "Hara Kiri" avec Georges Bernier, ancien engagé en Indochine. Le journal, qui inspirera dix ans plus tard le magazine américain "National Lampoon", n'a pas alors de vocation directement politique. Son équipe cherche à faire rire en dynamitant joyeusement toutes les conventions. Son slogan est transparent : "Hara Kiri, journal bête et méchant". Il est suivi de ce conseil provocateur "Si vous ne pouvez pas l'acheter, volez-le".

Pour ses rédacteurs, dessinateurs et photographes rien n'est sacré. Georges Bernier prend le nom du "professeur Choron", le journal étant installé au 4 de la rue Choron, dans le 9e arrondissement de Paris et sous son influence l'esprit grivois et le cynisme tout azimut règnent sur "Hara Kiri". Chacun connait l'épisode menant en novembre 1970 à l'interdiction de "Hara Kiri Hebdo" par Raymond Marcellin, le ministre de l'Intérieur de l'époque. Reportage : F.