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Richard Sennet

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Richard Sennett : la vie et le travail sans qualités. L’organisation sociale que nous promettent les nouvelles entreprises nous laisse voir un régime de pouvoir souvent illisible, marqué par la flexibilité, l’exigence de souplesse, les partenariats flous, la sympathie temporaire qui entoure bon nombre de travaux entrepris selon la logique du projet momentané [1]. Le moi liquide et souple qui y correspond diffère de la vieille notion de caractère inscrite dans les entreprises disciplinaires organisées sur le modèle militaire prussien que Weber nommait des « cages de fer » : forger son moi, discipliner ses désirs, s’engager fermement, poursuivre des engagements à long terme, être loyal, fidèle à ses causes et aux siens, accepter que les gratifications soient différées, composent les traits de notre personnalité par lesquels nous estimons devoir mériter l’estime et la reconnaissance des autres au sein d’une entreprise durable et stabilisée.

Mais les règles du jeu changent avec l’émergence des nouvelles entreprises flexibles. «Plus on préserve des emplois de qualité, plus le lien social résiste» Pour sortir de la crise, pourquoi, paradoxalement, ne pas faire confiance à la main de l’homme ? A l’heure où les objectifs économiques sont quasi exclusivement financiers et mécanistes - et ce, même à gauche -, un Américain, un peu idéaliste, un peu anarchiste - il le dit lui-même -, ose remettre au premier plan des valeurs fondatrices de l’activité humaine : l’artisanat matériel - comprendre le savoir-faire - et la coopération sociale. Enseignant à la New York University et à la London School of Economics, le sociologue Richard Sennett consacre une trilogie à l’homo faber dans l’espoir de revivifier cette vieille idée qui «fait de l’homme son auteur». «Un fabricant de vie à travers des pratiques concrètes», dit le chercheur. A ceux qui parlent de coût du travail, Richard Sennett répond «qualité» du travail, dont les fondations sont la compétence et la qualification.

Dans la sphère économique comme dans le milieu du travail, la perte de sens n’est-il pas le mal du XXIe siècle ? La civilisation urbaine remodelée par la flexibilité, par Richard Sennett. Explosion des solidarités, uniformité, solitude On y cherchait l’anonymat, la diversité, cette liberté de rencontres que procure la proximité de l’inconnu. Mais les villes étaient aussi des lieux de combat collectif et de solidarité. En invoquant la fin des hiérarchies, une organisation du travail « flexible », les nouvelles formes de production risquent de remettre en cause ce qui rendait les villes attachantes.

Car, pour faciliter le nomadisme des classes supérieures détachées du destin commun, commerces et architectures se standardisent, l’engagement cède le pas à la distance. Par Richard Sennett, février 2001 Aperçu Il arrive que les villes soient mal administrées, rongées par la criminalité, sales et délabrées. La ville offre aussi à ceux qui l’habitent la possibilité de développer une conscience d’eux-mêmes plus riche. Cependant, la ville n’assure pas toujours ces avantages. Taille de l’article complet : 3 072 mots. Vous êtes abonné(e) ? Vous n'êtes pas abonné(e) ? Coopérer et faire Société, avec Richard Sennett - Idées. Richard Sennett: "Il faut restaurer le vivre ensemble"

Richard Sennett est un des sociologues américains vivants les plus admirés. Discret, il trace son sillon à l'écart des modes intellectuelles. Cet élève de Hannah Arendt est un spécialiste des villes, ainsi qu'un théoricien des vicissitudes du monde du travail. Depuis 2008, il s'est lancé dans une trilogie consacrée à l'"Homo faber" ­ l'homme est d'abord et avant tout un artisan. Une manière de répondre à la crise actuelle qui laisse l'individu occidental démuni et fragmenté, faute d'outils matériels et conceptuels adaptés. Le deuxième volet de cette trilogie (Ensemble. Dans votre livre, vous faites le constat de la difficulté à "être ensemble" aujourd'hui.

La raison première, sans doute pas. Comment expliquez-vous que cette "éthique de la coopération", comme vous l'appelez, se soit évanouie? Les causes sont diverses. Or la coopération est justement un échange entre des personnes différentes, capables d'apprendre les unes des autres et de s'enrichir mutuellement. Pourquoi? Oui. "Le néolibéralisme ne tiendra plus très longtemps"